Institut Polytechnique de Paris
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Cap sur la performance sportive

Le 30 mai. 2024
La physique pour retranscrire les sensations des athlètes. C’est le credo de Phyling, la société fondée en 2018 par Romain Labbé et Jean-Philippe Boucher, anciens élèves de l’École polytechnique. Sur leur ancien campus, au sein du Drahi X-Novation Center, les deux comparses et leurs huit salariés élaborent aujourd’hui des capteurs de puissance (vitesse et force) sur mesure pour le sport de haut niveau. En ligne de mire, la performance des athlètes…et un peu plus encore.
Cap sur la performance sportive
Capteur intégré dans un pédalier de vélo - Crédits image : ©Phyling - DR

Tout commence en 2015, sur un aviron. Alors qu’ils font leur thèse au laboratoire d’hydrodynamique (LadHyX*) de l'École polytechnique, Romain Labbé et Jean-Philippe étudient l’écoulement de l’eau autour de la coque des bateaux et leur propulsion. Les deux doctorants cherchent à comprendre la mécanique des fluides en jeu dans ce sport et à déterminer la meilleure façon de propulser l’embarcation. « La fédération française d’aviron était très intéressée par nos résultats. Nous devions cependant embarquer du matériel de laboratoire très lourd et mobiliser deux ingénieurs pour sa mise en œuvre », se souvient Romain Labbé. Le besoin de miniaturiser se fait très vite ressentir, marquant le point de départ de leur aventure.

Finesse de mesure inégalée 

Les deux jeunes docteurs conçoivent leurs premiers capteurs embarqués et connectés à une application. Si l’ensemble parait rudimentaire, les données générées sont pertinentes et l’ensemble parfaitement approprié aux besoins des athlètes et de leur entourage technique, leur permettant d’adapter leurs gestes aux performances visées. Plusieurs fédérations sportives et même des laboratoires de recherche sollicitent alors les deux scientifiques. En 2018, une fois leur thèse soutenue, les deux jeunes docteurs profitent de la candidature de Paris aux Jeux Olympiques de 2024 pour développer leur projet entrepreneurial tout en répondant aux besoins des fédérations et des scientifiques impliqués dans le projet Sciences 2024. Phyling était lancée et capable de proposer une finesse de mesure jusqu’à lors inédite dans de nombreuses disciplines sportives de haut niveau (tir sportif, tennis, athlétisme, kayak…).

« Nous proposons par exemple à la fédération française de cyclisme des capteurs mesurant 200 fois par seconde les forces appliquées sur les pédales. Là où des appareils classiques enregistrent un point de mesure toutes les 5 secondes », souligne Romain Labbé. Pour parvenir à ce résultat, les fondateurs de Phyling ont challengé leurs connaissances en mécanique des matériaux et en électronique, développant ainsi un important savoir-faire dans le domaine des jauges de contraintes. Les capteurs sont en effet composés d’un fil électrique qui serpente sur un équipement donné, ici le pédalier. Selon les forces auxquelles il est soumis, ce dernier se déforme et le fil est tiré ou comprimé, induisant une micro-variation de sa résistance électrique. « Notre valeur ajoutée est d’instrumenter l’équipement. C’est-à-dire que nous étudions précisément où installer notre dispositif sans modifier le support et optimisons l’électronique à lui adjoindre pour amplifier les signaux et mesurer avec finesse cette résistance », explique le dirigeant. Autrement dit, chaque capteur est unique, spécifique à une demande et nécessite un gros travail d’étalonnage et de test. 

Au-delà du sport de haut niveau

L’équipe palaisienne propose donc une solution complète aux athlètes et à leurs entraineurs, depuis le capteur jusqu’au logiciel d’analyse des données. C’est d’ailleurs autour de ce dernier point qu’elle travaille et ouvre la voie à de nouveaux développements logiciels et algorithmiques qui faciliteront l’utilisation de la data récoltée. Mais aujourd’hui, les outils proposés par Phyling ne se cantonnent plus au sport de haut niveau. Des industriels spécialisés dans la conception de moteurs hydrauliques cherchent en effet à connaitre les contraintes infligées par leurs produits aux machines qu’ils équipent. Les problématiques à traiter sont les mêmes que celles existant entre le cycliste et son pédalier. Romain et Jean-Philippe relèvent le défi. La science du sport réserve encore bien des surprises.

*LadHyX : une unité mixte de recherche CNRS, École polytechnique, Institut Polytechnique de Paris, 91120 Palaiseau, France